topic commun, la menace.

Je ne suis pas du tout du genre à croire à ces messages qui ressemblent plus à des chaînes débiles comme celles qu'on trouve parfois sur les réseaux sociaux qu'à des réelles alertes. Mais pour le coup, je suis incapable de remettre la main sur mon collier, le seul bien de valeur que je possède réellement. C'est la chose la plus clichée au monde, mais il appartenait à ma mère et celle-ci étant décédée, c'est le seul souvenir qu'il me reste d'elle. Sortez pas les mouchoirs, je suis pas en train de chialer non plus. Je trouve seulement ça étrange de ne plus le trouver justement au moment où je reçois un message pour m'informer qu'on a retrouvé un objet de valeur à moi. Le message n'est pas signé, bien évidemment, mais au moins le lieu de rendez-vous ne m'est pas inconnu. C'est un genre de squat où je vais parfois traîner avec certaines filles du Rose's Cabaret et j'en viens à me dire qu'il est possible que j'ai perdu le collier là-bas.

Je prends une douche rapide parce qu'en travaillant de nuit, à 17h normalement je suis seulement en train de commencer à me préparer. J'enfile rapidement une robe noire, des collants, des bottines et une veste en jean, avec dans l'idée d'aller bosser directement ensuite. Dehors il caille sévère mais mon métier étant de me déshabiller devant des paires d'yeux inconnues, j'ai appris à ne plus vraiment craindre le froid. J'allume machinalement une cigarette sur le trajet me fige en constatant qu'il y a déjà plusieurs personnes qui attendent devant le studio. C'est le moment où ça devient étrange. Je me demande s'ils organisent pas un vide-grenier ou truc du genre pour refourguer les objets trouvés. Je n'ai pas vraiment le temps de taper la causette, parce que je suis pile à l'heure et que la porte s'ouvre quand j'arrive. J'entre la dernière et la porte se referme aussitôt derrière nous.

J'écarquille les yeux en avisant la scène, avec cette impression désagréable d'être dans un mauvais film d'horreur. Je crois que j'ai le palpitant qui s'emballe parce que j'aime pas les films d'horreur et que je suis facilement impressionnable. Malgré tout j'essaie de garder mon sang-froid et je déchiffre l'inscription. Putain on se croirait dans Harry Potter et je pense de suite à une mauvaise blague. Je dévisage les autres, parce que je suis persuadée que l'instigateur est parmi eux. " C'est quoi ce bordel ? "

Toi, curieux ? Nooon, pas ton geeeenre. Bon, OK, un peu. Surtout le mercredi. On est bien mercredi, non ? Tu sais deja plus, c'est pas important. Aujourd'hui, tu as rien foutu. Mais c'était bien, c'est bien quand on fait rien parce qu'on a envie de rien faire. En plus, tu as rien fait avec Bowen du coup c'était encore mieux. Enfin lui, il fait des pixels avec ses ordinateurs, beuglant contre des russes qui jouent en ligne avec lui mais toi, tu le regardais faire. Tu aimes bien. Tu aimes bien regarder les autres faire des trucs, ça te repose, surtout quand c'est Bobo parce que bobo il a toujours un truc drôle qui fait rire à dire. Du coup tu n'as rien fait, parce que tu étais trop pris dans ta tête par la lettre. Les énigmes, tu n'aimes pas trop. En plus, tu sais même pas ce que tu as pu perdre. Après, tu es beaucoup tête en l'air, du coup voilà, tu as pu perdre un truc hyper important (genre ton coeur) et même pas t'en rendre compte. Tu n'as rien à dit à Bowen et Cahal parce qu'ils auraient encore lever les yeux au ciel.

« - J'vais promener le chien ! »

Sauf que tu pars sans Blow, mais ça aussi ça arrive souvent. Tu as aussi oublié de t'habiller, tu n'es pas en caleçon mais en pyjama, un espèce de pantalon en toile fine bariolée et un simple gilet en laine sur les epaules. Et des tongs. Tu as un peu froid, mais ça va, tu as l'habitude. Tu arrives au lieu de rendez-vous avec deux minutes cinquante deux d'avance. Il y a des gens. Tu comprends pas trop, mais tu dis bonjour à tout le monde parce que tu es poli, maman t'a bien élevé. Quand la porte s'ouvre, tu es le premier à te précipiter dedans.
Oh.
Tu n'aimes pas ce genre de surprise. Tu n'aimes pas les surprises en général, tu n'as pas le temps de te préparer. Hormis quand c'est un gâteau, parce que un gâteau tu as cas le manger pour faire plaisir à la personne. C'est bon les gâteaux.
Clac.
Tu comprends pas, fixant successivement la porte et les bougies. Tes doigts s'agitent, dessinant le vide. Tu réfléchis trop, tu essayes de comprendre des trucs sans y parvenir. Pour tu te dis : c'est rigolo, t'as vu JCey, on dirait du sang sur le mur.
Et là, Neilouchou, tu paniques. Tu bouscules les gens, tu tires sur la poignée, tu renverses une bougie et te brûle le poignet du pied, tu pleures, tu hurles sans même réfléchir. Et tu finis par te poser dans un coin, te balançant d'avant en arrière, frappant ton front, fixant Jean-Charles devant toi en murmurant des « - 'veux pas être assassiné » mouillé de sanglots. En plus, personne va savoir où tu es et tu vas rater le dîner.