c'est le manque de sommeil qui pulse dans ses veines. son coeur qui s'affole pour la tenir éveillée, un peu plus longtemps. elle gratte des secondes, des minutes, des heures. elle craint de rejoindre son lit et le néant qui s'y couche, nuit après nuit, son unique compagnie. elle en voit défiler, des mains, des bouches, des parfums. mais une fois les talons et la mini-jupe au placard, c'est la solitude qui la baise, la gamine. et ses pensées qui l'usent.
il parait que les gens aiment dormir pour fuir leur réalité. blue, elle, elle fuit ses cauchemars. ces démons de morphée qui la rongent une fois ses yeux fermés.
des cauchemars ou les bribes d'un passé qu'elle ne pardonne et n'oublie pas. elle revoit ses parents. et ressent à nouveau le poids de la culpabilité.
sensation étrange pour cette créature qui ne croit plus en rien, qui confond le bien et le mal pour peu qu'ils existent.
alors elle fuit à son tour. elle tourne en rond dans dédale à la recherche d'un refuge dans l'obscurité, bercée par la brise nocturne et les étoiles.
un pas après l'autre, elle parcourt la ville jusqu'à terrain de jeux.
elle entend presque les rires des enfants.
elle est là, Esma.
haute comme trois pommes, la peau dorée de son héritage, ses grands yeux bleus.
elle a été enfant. il y a longtemps. pas tant que cela.
des histoires émiettées, abusées par le temps. un soupir.
elle s'assoit à l'une des balançoires et pose sa tête contre la chaine qui la maintient.
elle en oublie la tête entière.
- t'es seule ma jolie ?
il est fier de lui, de sa trouvaille. ce soir, l'inconnu prendra sa revanche sur la vie en abusant d'une femme qu'il pense à sa merci. il en salive, elle en tremble.
elle ne connait que trop bien l'appétit des hommes.
et ce regard qui ne présage rien de bon.